La grossesse n’est pas toujours cet état de grâce que l’on décrit habituellement. Au contraire, nombre de petits et grands maux ponctuent ces neuf mois éprouvants pour les futures mamans. Parmi ceux-là, les troubles du sommeil avec par exemple le syndrome d’apnées du sommeil…
Ce n’est pas sur Sommeil Santé qu’on vous dira le contraire, le sommeil a une importance capitale tout au long de la vie. C’est d’autant plus vrai durant une grossesse, particulièrement fatigante d’un point de vue physique et émotionnel.
Les troubles du sommeil sont pourtant courants, qu’ils soient préexistants à la grossesse ou qu’ils surviennent à cette occasion.
Grossesse et qualité du sommeil
La qualité du sommeil est fréquemment troublée chez la femme enceinte, alors que son importance se révèle d’autant plus essentielle durant cette période éprouvante à bien des niveaux. Il est en effet courant que les femmes enceintes souffrent d’un sommeil fragmenté, avec des symptômes qui apparaissent ou s’accentuent généralement au troisième trimestre.
En cause, les nombreux changement hormonaux, l’augmentation du volume utérin, et du débit cardiaque qui induisent des modifications de la physiologie respiratoire et cardiovasculaire. Les femmes enceintes ont donc un risque plus élevé de développer des troubles du sommeil et notamment d’apnées, ou de voir leurs symptômes s’aggraver. Il peut toutefois s’avérer difficile de poser le bon diagnostic chez ces patientes, du fait des changements physiologiques directement dus à la grossesse et qui provoquent des symptômes similaires. Ainsi, somnolence et ronflements s’observent fréquemment en cours de grossesse. D’autres facteurs liés à cet état peuvent aussi entraîner des réveils nocturnes et donc un sommeil fragmenté : crampes, mouvements fœtaux, fréquents besoins d’uriner, douleurs gastriques… Auxquels s’ajoutent d’autres symptômes plus généraux comme la fatigue, les maux de tête, le stress ou l’anxiété.
Le sommeil est donc largement malmené durant la grossesse. Malgré cela, la question reste largement ignorée ou sous-estimée par les professionnels de santé. Ce n’est pourtant pas après la naissance de son bébé que la maman pourra se reposer ! Et surtout, ces troubles du sommeil peuvent avoir des conséquences, parfois lourdes, sur le bon déroulé de la grossesse ainsi que sur la santé de la femme et de son enfant. Le docteur Nathalie Aisenberg, ORL attachée à l’Hôtel-Dieu à Paris en médecine du sommeil, avait déjà alerté sur le sujet lors d’un précédent article sur les troubles respiratoires du sommeil pendant la grossesse.
Et si la grossesse épargne rarement le sommeil des futures mamans, elle révèle même chez certaines un SAHOS, syndrome d’apnées et d’hypopnées obstructif du sommeil. Non sans conséquences…
Grossesse et SAHOS
C’est aujourd’hui le docteur Fabrice Thoin, cardiologue à la Clinique Bouchard de Marseille, qui nous explique plus en détails les causes et conséquences du syndrome d’apnée du sommeil pendant la grossesse :
« Il faut savoir que la prévalence du SAHOS augmente pendant la grossesse car l’œstrogène favorise l’apparition d’œdèmes qui gênent les voies respiratoires. À cela s’ajoute l’effort et la difficulté de respiration, qui augmentent aussi le risque d’apnées. Environ 10 % des femmes seraient concernées au premier trimestre, et 28 % au dernier trimestre. Et encore, ces chiffres sont probablement sous-estimés…
Le SAHOS a d’ailleurs grimpé de 24 % chez les femmes enceintes entre 1998 et 2009, parallèlement à l’augmentation de l’obésité. Ces deux phénomènes ne sont pourtant pas exclusivement liés : il est certain que le surpoids favorise la survenue du SAHOS, mais il y a aussi beaucoup de femmes enceintes qui font des apnées sans être en surpoids.
En réalité, ces femmes ont déjà la pathologie mais elle n’a pas encore été détectée. La grossesse ne fait que la mettre en évidence, ainsi que d’autres anomalies cardio-vasculaires. Ces patientes font par exemple du diabète et de l’hypertension, et cela se reproduira à chacune de leurs grossesses, avec comme possibles conséquences une pré-éclampsie, une hypoxie, un accouchement prématuré, un retard de croissance de l’enfant… Il faut donc particulièrement les surveiller !
Et lorsque le diagnostic de SAHOS est posé, il leur est généralement proposé d’être traitée par la machine à pression positive continue, mieux connue sous l’abréviation de « PPC ». Elles l’acceptent très bien, car elles comprennent qu’il en va de la santé de leur bébé…
Généralement, l’apnée diminue après la grossesse, mais cela ne doit pas empêcher de rester très vigilant : d’une part, ces mères gardent un risque cardio-vasculaire à moyen et long terme ; d’autre part, leurs enfants ont également un risque cardio-vasculaire augmenté à court et moyen terme, c’est-à-dire sur 10 à 40 ans.
On parle trop peu de ces problématiques, même si de grandes études sont heureusement en train de se lancer à ce sujet à travers le monde. Il s’agit pourtant d’un problème de santé publique majeur ! Et si cela peut paraître alarmant, souvenons-nous que le plus grand risque reste l’ignorance… »
Alors sans non plus s’inquiéter outre-mesure, il est important de rester attentif à la qualité de son sommeil durant une grossesse. En cas de doute, votre médecin saura vous rassurer ou vous orienter vers un professionnel de santé spécialisé, pour éviter des petits soucis de santé et vous permettre d’accueillir votre bébé bien reposée !
(Crédit photo : Gelitukha, via Canva)
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